"Mon Logement, Ma Vie" Episode 9
Dans "Mon Logement, Ma Vie", les seniors ont la parole ! Dans cet épisode, rencontre avec Pierre, un retraité de 91 ans. Sa femme étant en EHPAD, il vit donc tout seul dans son pavillon à Lérigneux.
Dans "Mon Logement, Ma Vie", les seniors ont la parole ! Dans cet épisode, rencontre avec Pierre, un retraité de 91 ans. Sa femme étant en EHPAD, il vit donc tout seul dans son pavillon à Lérigneux.
Journaliste : Bonjour Pierre. Merci de répondre à nos questions. Comment est-ce que vous vivez cette période ?
Pierre : Bon, premièrement, je vis tout seul. Ma femme est en EHPAD. J’ai une maison individuelle alors, je peux faire le tour de mon jardin et de ma cour. Ce n’est pas pareil mais je m’impose quand même tous les jours d’aller faire un tour pendant une heure, d’aller me promener à pied dans le quartier, dans le lotissement où j’habite pour marcher histoire de prendre l’air. J’ai quand même plus de 90 ans.
Journaliste : Dites donc, vous ne les faites pas dans la voix.
Pierre : Non, mais c’est comme ça. Tant mieux pour moi !
Journaliste : Dites-moi. A quoi ça ressemble pour vous une journée type : du matin, midi jusqu’au soir ?
Pierre : Je me réveille entre 8h et 8h 30 : je me lève, je déjeune, je fais ma toilette. Après, je commence à jeter un coup d’œil dehors. J’ai un sous-sol alors j’y descends deux ou trois fois, ça me fait marcher et je regarde s’il n’y a pas de fuite, des trucs comme ça. Ensuite, je me prépare à manger. C’est moi qui me fais à manger comme ça, je mange à l’heure que je veux et je mange ce que je veux. Je vais chercher mon pain chez mon boulanger qui est à 200 mètres. Je mange. Et puis, l’après-midi vers 14h30 – 15h, je vais faire ma promenade pendant une heure. Après je tourne en rond à la maison. Je m’occupe ou je regarde la télévision.
Journaliste : Du coup, vous vous occupez de vous faire à manger. Comment ça marche ? Vous allez faire les courses régulièrement ?
Pierre : J’ai un de mes fils qui n'habite pas loin. Si j’ai besoin de quelque chose, il va me le chercher. J’ai une grande surface qui est à 300 mètres. J’y suis allé la semaine dernière, pour la première fois depuis 5 semaines. J’y suis allé le temps d’une heure, à une heure où il y a le moins de monde possible. J’y suis resté 15 – 20 minutes, j’ai fait des commissions pour la semaine.
Journaliste : Vous vous êtes déplacé avec un masque ?
Pierre : Ah, toujours ! J’ai toujours mon masque. Quand je vais me balader, si je ne vois personne, je ne vois pas à quoi ça me sert. Mais j’en ai toujours un sur moi si jamais il y a quelqu’un qui s’arrête pour discuter, je suis obligé de le remettre. Si je vais chercher mon pain, j’ai le masque, les gants, j’ai tout.
Journaliste : Ce n’est pas compliqué d’être seul à la maison et de devoir tout faire ?
Pierre : C’est une question d’organisation. C’est comme tout. Je prends mon mal en patience et puis c’est tout. Pour l’instant, j’arrive à m’en sortir et je ne trouve pas le temps trop long. Je m’occupe. J’ai même passé l’hiver. Je reste un plus sur la télé. Je regarde toutes les chaînes et je n’en regarde aucune, je change toutes les 20 secondes.
Journaliste : Vous avez le moral.
Pierre : Il faut le garder. Si vous perdez le moral, vous êtes foutu. Avant, j’allais voir ma femme à l’EHPAD. Elle est à 15 km. J’y allais tous les soirs ; j’allais la faire manger. Ça m’occupait. Je vais essayer d’y aller, parce que j’ai vu qu’ils avaient réouvert. Je ne sais pas comment ça va se passer. Enfin bon, on verra ça la semaine prochaine.
Journaliste : Ce n’est pas dur ça justement ? Vous aviez cette habitude d’aller voir votre épouse…
Pierre : Ça a été dur au départ. Mais finalement j’en ai pris bon parti et puis c’est tout. Je téléphone pour avoir de ses nouvelles et puis c’est tout.
Journaliste : Vous appelez plusieurs fois dans la semaine ?
Pierre : Deux fois par semaine.
Journaliste : Donc là au moins, vous savez qu’on s’occupe bien d’elle.
Pierre : Je suis quasi tranquille. Je sais qu’elle est entre de bonnes mains. Je ne m’inquiète pas pour ça.
Journaliste : Vous êtes rassuré, quoi !
Pierre : Voilà, je suis rassuré.
Journaliste : Finalement, qu’est-ce qui est le plus compliqué pour vous ?
Pierre : Le contact humain.
Journaliste : C’est-à-dire ?
Pierre : Je suis assez bavard. Je ne vois personne de la semaine des fois. A part le téléphone, je passe des semaines entières sans voir un chat. Et puis, la femme de ménage ne vient plus depuis un mois et demi.
Journaliste : Donc ça, ça vous manque le contact ?
Pierre : Oui, parce que je suis assez bavard. J’aime bien discuter avec les gens. Des fois, je téléphone à mes enfants. Je les ai au téléphone mais ce n’est pas pareil.
Journaliste : D’ailleurs, comment vous faites maintenant pour échanger avec vos proches, vos enfants, votre famille ?
Pierre : On s’appelle au téléphone. Ils sont un peu éparpillés en France. J’en ai en Dordogne, à Narbonne, dans la Savoie. On se téléphone, on se raconte un peu ce qu’on fait. Les petits-enfants ont leur vie, ils me téléphonent aussi de temps en temps.
Journaliste : Vous avez au moins un appel enfin plusieurs appels dans la semaine ?
Pierre : Oui, j’en ai plusieurs dans la semaine. Ça, c’est sûr. On a déjà le contact avec eux. Je sais qu’ils vont bien. Je sais que si j’ai besoin de quelque chose, je peux les appeler, ils se débrouilleront pour me venir en aide.
Journaliste : Est-ce qu’il y a des choses que vous ne faisiez pas avant et que vous faites maintenant ?
Pierre : Ce serait plutôt le contraire. Parce que je ne vois pas ce que je fais maintenant … Si, je regarde plus souvent la télé, c’est tout !
Journaliste : Et vous regardez quoi à la télé ?
Pierre : N’importe quoi ! Je change de chaîne toutes les 4 secondes. Je fais toutes les chaînes, je pars d'en haut jusqu’en bas. J’ai tout vu et je n’ai rien vu du tout. Ce qui m’intéresse, ce sont les émissions historiques, géographiques, mais tout ce qui est télé-réalité, je n’aime pas. Ce n’est pas pour moi.
Journaliste : Dans quelles pièces vous vous retrouvez le plus souvent chez vous finalement ?
Pierre : La cuisine et la salle de séjour. Je fais la cuisine, je fais la vaisselle. Comme je vous l’ai dit, je mange ce que je veux et à l’heure que je veux. Si je veux manger à 11h30, je mange à 11h30. Si je veux manger à 1h de l’après-midi, je le fais. Personne ne me dira rien.
Journaliste : Il n’y a aucun compte à rendre.
Pierre : Voilà. Je n’ai de compte à rendre à personne. Et je mange aussi ce que j’ai envie de manger. J’ai des amis qui me disent souvent au téléphone « pourquoi tu ne te fais pas porter des repas ? ». Pour l’instant, j’aime autant le faire comme ça, je fais ce que je veux. Et ça m’occupe surtout.
Journaliste : Vous me disiez tout à l’heure que vous avez un peu plus de 90 ans. Ce qui est bien en vous entendant et dans ce que vous décrivez, c’est qu’on perçoit quelqu’un qui est parfaitement autonome. C’est important ça encore d’avoir son autonomie à votre âge et dans votre maison ?
Pierre : Tant que j’ai encore la santé, je peux me débrouiller tout seul, c’est surtout ça. Tant que je me suffis à moi-même, ça peut aller. J’ai fait changer ma baignoire par une douche, des trucs comme ça. Pour l’instant, je me suffis tout seul.
Journaliste : Finalement, vous êtes mieux en étant autonome chez vous qu’autonome dans une maison de retraite ou un établissement spécialisé ?
Pierre : Ah, certainement. Pour moi, oui. Parce que j’ai l’exemple de ma femme qui est en maison de retraite. Tant que je n’ai pas besoin d’y aller, je n’irai pas. Il y a des contraintes. Vous n’êtes pas chez vous. Il y a peut-être des gens pour vous soigner si vous avez un pépin mais enfin de vivre en communauté, je ne me vois pas. Bon, si j’étais obligé d’y aller, je le ferai. Mais le plus tard possible.
Journaliste : Pierre, vous pensez déjà un peu à l’après-confinement ?
Pierre : Oh oui. De toute manière, confiné ou pas confiné, je ne vais pas loin non plus. Avant, j’allais me balader. Je prenais ma voiture et j’allais chez mes enfants soit en Savoie ou dans le Midi, soit à droite à gauche … Je ne peux plus y aller. Je verrai quand je serai déconfiné si je peux voyager, je reprendrai le train. Moi, je suis pour le confinement. Il y en a qui se baladent à gauche à droite et je me demande ce qu’ils font dehors. A mon âge, vous me direz, je ne risque plus rien maintenant. A 90 ans, je sais que j’ai quelques années devant moi. Ça me fait de la peine pour mes enfants, ou plutôt pour mes petits enfants qui ont leur vie à faire. C’est différent pour eux. Moi personnellement, vous vous direz l’avenir, je ne m’inquiète pas. On avisera au fur et à mesure.
Journaliste : En tout cas Pierre, je vais vous souhaiter plein de bonnes choses.
Pierre : Merci bien.
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Témoignages recueillis par Jean-Baptiste Vennin