"Mon Logement, Ma Vie" - Martine, 71 ans
Dans "Mon Logement, Ma Vie", les seniors ont la parole ! Pour ce deuxième épisode, nous allons dans les Pays de la Loire pour rejoindre Martine, 71 ans et demi, veuve qui vit dans sa maison à Challans, en Vendée.
Bienvenue dans ce deuxième épisode de la troisième saison. C’est donc la troisième saison de « Mon logement, ma vie ». Comme lors des deux précédentes, nous continuons d’aller à votre rencontre pour prendre de vos nouvelles. « Mon logement, ma vie », le podcast qui vous donne la parole. Un programme à écouter sur Independanceroyale.com, disponible également sur l’ensemble des plateformes de diffusion de podcasts. Pour ce deuxième épisode, nous allons dans les Pays de la Loire pour rejoindre Martine, 71 ans et demi, veuve qui vit dans sa maison à Challans, en Vendée.
Journaliste : Bonjour Martine. Merci de répondre à mes questions. Première question justement : comment s’est déroulée pour vous et vos proches la fin de l’année 2020 ?
Martine : Comme on peut, en fonction de ce qu’on nous dit. Je ne me suis jamais vraiment très sentie confinée, parce que je sors le matin, de bonne heure, faire mes courses, à raison d’une demi-heure, deux fois par semaine. Après, je rentre. Sinon, j’ai une petite chienne que je promenais tous les jours sauf quand il pleut. J’y vais aussi à des moments où il n’y a personne. Donc, je rencontre peu de monde.
Journaliste : Et d’une manière générale, comment s’est déroulée pour vous cette année 2020 avec ces deux confinements ?
Martine : Très traumatisante par les médias, mais j’ai pris l’habitude de ne plus être traumatisée. Le traumatisme, je l’ai eu il y a trois ans. Donc maintenant, je fais en sorte de vivre comme je peux. Cela ne m’a pas perturbée énormément.
Journaliste : Il y a eu des différences entre le premier et le deuxième confinement pour vous ?
Martine : Oui. Le premier a été pour moi plus difficile, parce que je n’étais pas encore habituée. Au deuxième, j’étais habituée. J’avais déjà ma façon de vivre. Donc, ça ne me dérangeait pas trop.
Journaliste : Du coup, comme vous parlez de façon de vivre, comment étaient organisées vos journées pendant ce deuxième confinement ?
Martine : Pendant le deuxième confinement, je me lève tôt. Je fais ce que j’ai à faire chez moi pour l’entretien de ma maison. Ensuite, à l’ouverture des supermarchés quand j’ai besoin d’y aller, j’y vais à 8h45. Je passais vite fait une demi-heure là. Ensuite, si j’avais besoin d’aller prendre l’air, j’allais dans un coin qui se trouve à moins d’une heure de chez moi. J’ai eu beaucoup de liberté quand ils ont permis qu’on aille à plus de 20 km. Je vais au bord de la mer. On est à 17km de la mer, donc je vais au bord de la mer.
Journaliste : Cela vous fait du bien ? ça fait un bol d’air ?
Martine : C’est plus qu’un bol d’air. Pour tout vous dire, mon mari est à la mer. Pour moi, c’est la manière de se rencontrer quand on était ensemble. Ça peut vous paraître bizarre. Son crématorium est remis à la mer. A la base, on est de région parisienne, on est venus là il y a huit ans. La maladie est venue s’y mettre, comme mon mari était venu ici pour profiter de la mer au maximum, il est reparti à la mer. Si vous voulez, la mer me sert d’anti-stress.
Journaliste : Il est parti il y a trois ans, c’est cela ?
Martine : Oui.
Journaliste : Du coup, c’est une façon aussi de profiter de lui toujours en vous rendant à la mer.
Martine : Oui. Pour moi, c’est l’unique façon de profiter de lui et d’être en communication. J’y vais avec ma chienne. J’y passe une heure, une heure et demie. Cela dépend. Des fois, j’emmène mon sandwich. Ça fait du bien, parce que pour moi, la seule chose qui m’a sortie, c’est la sophrologie. J’ai une amie qui est sophrologue. Il fallait bien s’en sortir.
Journaliste : C’est clair.
Martine : De toute façon, il n’y a pas de choix, surtout que je suis seule. Je vous dis. Je suis seule au monde. Je n’ai pas de famille, pas d’enfant. J’ai des amis, mais ce n’est pas de la famille. Le restant de ma famille, j’ai un beau-frère qui est à 800 km de chez moi. C’est tout.
Journaliste : J’imagine que vous ne le voyez pas tous les jours.
Martine : Non. Je voulais partir le voir et prendre l’avion. Donc, c’est foutu aussi. Mais, j’ai beaucoup d’amis. Donc, ça ne me pose pas trop de problème.
Journaliste : Dans votre entourage amical, les gens se portent bien ? Tout le monde va bien ?
Martine : On a tous fait attention. On se porte tous bien. Les plus jeunes ont fait attention aux plus âgés. On a fait des commissions les uns pour les autres. Quand il manquait quelque chose, on ne se déplaçait pas forcément soi-même. On disait « voilà, on a commandé notre poisson par Internet. On nous a livrés sur place. On faisait des groupements » Un coup, c’était moi, parce que je suis très dispo et valide. Un autre coup, c’étaient d’autres gens. On a alterné.
Journaliste : Martine, est-ce que vous avez des craintes pour cette année 2021 ? Est-ce que vous craignez par exemple une troisième vague, un troisième confinement ?
Martine : Je n’ai pas de crainte. Je n’espère qu’une seule chose, c’est la vaccination pour moi.
Journaliste : Pourquoi ?
Martine : Parce que je n’ai rien à perdre. Je sais très bien que ça va arriver. Mais, on s’habitue, vous savez. On s’habitue à tout dans la vie. On est bien forcé.
Journaliste : Du coup, vous attendez avec impatience le vaccin ?
Martine : Ah oui. J’espère qu’en février, je serai vaccinée. À la base, je sors du milieu médical et du milieu des laboratoires pharmaceutiques.
Journaliste : D’emblée, vous êtes convaincue ?
Martine : Moi, j’ai toujours fait énormément confiance à la médecine pour différentes raisons, surtout quand mon mari a été malade. Je leur ai fait énormément confiance. Dans le milieu où j’ai été, à l’hôpital de Nantes, ce sont des champions.
Journaliste : Martine, à 71 ans et demi, vous êtes considérée malgré tout comme une personne à risque par les autorités sanitaires. Cela vous inquiète ou pas plus que cela ?
Martine : Pas plus que cela. Je ne suis pas du genre inquiète. Non, à partir du moment où je fais tout ce qu’il faut pour que ça aille bien. Pourquoi pas ?
Journaliste : Martine, vous avez des hobbies, des passions ?
Martine : Ah oui. Les fleurs et les animaux car je suis une ancienne toiletteuse de chiens. J’écoute de la musique. J’avais un mari musicien. Donc, j’écoute de la musique. Je ne chante plus en chorale, parce qu’on n’a plus de chorale. Sinon, je chante. Je fais plein de trucs, surtout la ballade avec mon chien. Je suis occupée toute la journée.
Journaliste : Et le jardin, y-a-t-il des choses à faire en cette saison ?
Martine : Pas grand-chose en ce moment, à part voir les fleurs qui bizarrement poussent encore alors qu’elles ne devraient plus être en vie. Il y a des choses très bizarres qui se passent dans la nature.
Journaliste : Ce n’est pas très rassurant non plus.
Martine : Non. Mais bon, j’en profite. On verra bien ce qui se passera. Je ne suis pas d’un naturel inquiet. Quand vous avez eu à assumer quelqu’un de malade pendant deux ans et demi, je peux vous dire qu’après, vous n’êtes plus inquiet. Cela vous passe par-dessus la tête.
Journaliste : Oui. Il y a des choses qui sont moins importantes d’un coup.
Martine : Oui. C’est beaucoup moins important maintenant pour moi. J’ai fait ce que j’avais à faire. Maintenant, le reste ne m’inquiète pas. Tout ce que je ne voudrais pas, c’est que je sois contaminée et que je transmette ça à quelqu’un. Voilà, la seule chose qui me préoccupe, c’est de ne pas contaminer quelqu’un. Je me suis encore fait tester il y a trois semaines, je suis négative. Donc, tout va bien.
Journaliste : Avec vos amis ou avec votre beau-frère, comment est-ce que vous vous échangez ?
Martine : Avec mon beau-frère, c’est au téléphone pratiquement tous les jours. Sinon, avec mes amis, on est à moins d’un kilomètre chacun. Donc, c’était par zoom pendant un certain temps. J’ai une amie à Bordeaux. Sinon, j’ai une amie en Californie, c’est aussi par zoom.
Journaliste : Vous vous dites que quand tout cela sera terminé, vous aurez l’occasion d’aller la voir ?
Martine : Oui. Ah la la. Je n’attends qu’une chose, c’est d’être libérée et pouvoir prendre ma voiture et m’en aller n’importe où, prendre l’avion. J’espère aller en Martinique l’année prochaine, au mois de janvier. J’espère que cela va s’arrêter.
Journaliste : Du coup, vous me direz que vous partirez en Martinique. Y-a-t-il des destinations que vous voudriez faire quand tout ira bien ?
Martine : Moi, j’ai beaucoup voyagé avant. Je voudrais retourner en Corse, parce que c’était notre pays de prédilection avec mon époux. Je voudrais connaître la Martinique. D’un seul coup, ça me branche. Je voudrais aller en Martinique.
Journaliste : Et la Californie ?
Martine : Ah, ça va être plus difficile, là du temps de Trump, je n’y serais pas allée. Mais là, s’ils sont un peu plus cool, pourquoi pas. Elle m’attend depuis des années ma copine.
Journaliste : Sinon, c’est elle qui vient.
Martine : Ah, elle est venue en France. On s’est vues il y a une quinzaine de jours. Elle a quand même réussi à passer en France, et elle est venue.
Journaliste : Vous avez quand même pu voir du monde.
Martine : Ah oui, on reçoit du monde.
Journaliste : Martine, quand je vous écoute comme ça, vous avez plutôt l’air en forme. Vous êtes indépendante chez vous dans votre logement. Pourquoi c’est important cette indépendance chez soi ?
Martine : Pour garder une vie active, ne pas se sentir vieillir. C’est rester dans le milieu qu’on aime, puis, avoir envie de regarder des choses chez soi : des tableaux, d’écouter de la musique et ne pas avoir à demander l’autorisation à quelqu’un pour le faire. Moi, si j’ai envie de regarder un film à 3 heures du matin, je me lève et je vais le voir. Donc, je ne me vois pas pour l’instant dans un autre milieu que chez moi.
Journaliste : Vous regardez quoi à 3h du matin à la télé ?
Martine : Des replays. Mais bon, quand vous avez quelqu’un de malade, vous perdez le sommeil. Pour surveiller un peu les machines la nuit, vous perdez le sommeil. Ça fait trois ans que j’essaie de récupérer le sommeil. Ma manière à moi de récupérer le sommeil, c’est de regarder des films. Après, je vais me coucher, il n’y a pas de problème.
Journaliste : Vous vous endormez devant ?
Martine : Oui.
Journaliste : Comme ça, vous ne savez pas la fin du film.
Martine : Oui, mais je recommence une deuxième fois.
Journaliste : Vous avez bien raison.
Martine : C’est pour ça que c’est très difficile. J’ai des amis qui me bousculent un peu et qui me disent « tu n’es pas vieille. Tu devrais rencontrer quelqu’un. » Non. Ce n’est pas que mon mari m’en aura empêchée. Pas du tout. Il savait très bien ce qui l’attendait. Donc, on était très au courant mais je ne peux pas. On devient trop indépendant quand on peut faire tout ce qu’on veut. Si j’ai envie de déjeuner à 2h de l’après-midi, ça sera cela. Si c’est à 11h du matin, ça sera autre chose.
Journaliste : Et puis, quand bien même, si on est votre amie ou pas, on n’a pas à vous dicter votre vie. Vous la gérez comme vous l’entendez.
Martine : Personne ne dicte ma vie. C’est sûr.
Journaliste : Vous agissez pour vous. C’est bien.
Martine : Que pour moi, que pour entourage. Je suis disponible pour mes amis s’il y a quoi que ce soit à faire. Quand on me demande, je dis « oui », je dis « non », peut-être pas aujourd’hui, peut-être dans une heure. Je suis très dispo.
Journaliste : Chez vous, dans quelle pièce vous êtes le plus souvent ?
Martine : Dans le salon.
Journaliste : Pourquoi ?
Martine : Il y a tout. Il y a la musique, la télé. Il y a de l’espace. Il y a tout ce qu’il faut. J’ai mon chien en face de moi, ma chatte sur les genoux. J’ai une chattoune qui est entrain de ronronner sur mes genoux.
Journaliste : Elle est tranquille ?
Martine : Elle est cool. Puis, il y a la chienne qui est devant mon pied, sur sa couette. Elle dort. Elle ronfle même en ce moment. Il y a la chatte qui est en train de téter mon pouce, vous voyez.
Journaliste : Martine, on est en période de vœux. Quels sont les vôtres par rapport à cette année 2021 ?
Martine : Enormément la santé, puis de sortir de ce Covid bien. Puis, qu’on soit tous vaccinés et qu’on en sorte.
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Témoignages recueillis par Jean-Baptiste Vennin